La République Démocratique du Congo a officiellement lancé, mercredi 8 octobre, au Salon Rouge de l’Immeuble du Gouvernement, les travaux de la Commission interinstitutionnelle chargée de la rédaction du Plan national du numérique 2026-2030 (PNN 2) et de la Stratégie nationale de l’intelligence artificielle (IA). Une nouvelle étape décisive franchit dans sa transformation digitale.
Présidée par le ministre de l’Économie numérique, Augustin Kibassa Maliba, la cérémonie marque, selon lui, la portée historique, « Nous voici arrivés à un moment charnière et historique de notre trajectoire numérique nationale. Il ne s’agit plus seulement de rattraper un retard, mais bien de viser le leadership sous-régional et continental. »
La vision “DRC Digital Nation 2030” : une boussole pour l’avenir

Ce lancement s’inscrit dans la continuité de la vision “DRC Digital Nation 2030”, dévoilée par le président Félix Tshisekedi le 27 septembre 2025 à New York, en marge de la 80ᵉ Assemblée générale des Nations unies. Cette vision fixe pour cap la transformation numérique complète du pays.
Le Chef de l’État avait souligné à cette occasion que la RDC devait capter « pleinement les dividendes du numérique » et se positionner comme un acteur clé des transitions numérique et énergétique, grâce à ses ressources en minerais critiques.
« Cette accélération n’est pas une option : c’est une nécessité impérieuse, le socle de la diversification de notre économie, de la création d’emplois pour notre jeunesse dynamique et de l’amélioration de l’efficacité de nos services publics », avait-il déclaré.
Pour donner corps à cette ambition, le président Tshisekedi a annoncé un engagement financier historique d’un milliard de dollars américains du Trésor public pour la période 2026-2030.
Ce financement s’ajoute aux 500 millions de dollars déjà mobilisés auprès des partenaires internationaux tels que la Banque mondiale et l’Agence française de développement (AFD). Au total, 1,5 milliard de dollars seront consacrés à la transformation numérique du pays.
Les quatre piliers du futur Plan national du numérique

Le ministre Kibassa a présenté les quatre piliers structurants du PNN 2026-2030 :
- Infrastructures et connectivité : Achever le backbone national en fibre optique, multiplier les datacenters de type Tier 3 et Tier 4 et connecter 25 millions de Congolais encore exclus du numérique.
- Plateformes et services publics numériques : Passer du guichet physique au guichet unique numérique, pour digitaliser progressivement l’administration et renforcer la transparence.
- Capital humain et inclusion numérique : Lancer un programme national des métiers du digital afin de former massivement les jeunes aux compétences du XXIᵉ siècle (IA, cybersécurité, data science, développement logiciel, etc.).
- Cybersécurité et confiance numérique : Mettre en place un Centre des opérations de sécurité (SOC), un CERT national et opérationnaliser l’Agence nationale de cybersécurité (ANCy) prévue par le Code du numérique.
« Il n’y a pas de développement numérique durable sans un cyberespace sûr, résilient et digne de confiance », a insisté le ministre Kibassa.
Outre ces piliers, le PNN 2 reposera sur cinq axes transversaux : l’entrepreneuriat, l’intelligence artificielle, l’innovation, la souveraineté numérique et les partenariats stratégiques.
IA levier stratégique de souveraineté

Une place centrale est réservée à l’IA, que le ministre Kibassa a décrite comme « une révolution comparable à l’invention de l’électricité ou d’internet ».
Rappelant les instructions du Président Tshisekedi, il a souligné que le capital humain doit être au cœur de cette stratégie, notamment à travers la création d’une Académie d’intelligence artificielle. « L’IA n’est pas simplement une question de technologies et d’algorithmes, elle est d’abord et avant tout une question de compétences, de créativité et de souveraineté intellectuelle », a-t-il déclaré.
La stratégie IA de la RDC devra répondre à des questions fondamentales :
- Comment utiliser l’IA pour améliorer les services publics ?
- Comment former les jeunes aux métiers de demain ?
- Comment attirer les investissements tout en garantissant une IA éthique, responsable et souveraine ?
Le ministre a également appelé à la mise en place d’une infrastructure de calcul souveraine, à la création de laboratoires de recherche en IA, au financement de projets innovants et à la définition d’un cadre éthique et réglementaire clair.
Les travaux seront coordonnés par le ministère de l’Économie numérique, en collaboration avec les institutions publiques, les provinces, le secteur privé, les universités, la société civile et les partenaires techniques et financiers.
Le ministre a remercié l’Autorité de régulation des postes et télécommunications du Congo (ARPTC) et l’Agence pour le développement du numérique (ADN) pour leur appui technique et financier.
« Vous avez été choisi pour votre expertise et votre sens patriotique. Le Chef de l’État a fixé des échéances, je compte donc sur votre engagement, votre professionnalisme, votre rigueur et votre patriotisme pour élaborer dans les délais ces deux stratégies pour baliser le chemin de la transformation de la République Démocratique du Congo en une Nation digitale ouverte, inclusive et prospère. » a déclaré Kibassa, tout en lançant un appel à la mobilisation collective.
Les premières étapes techniques ont d’ores et déjà été amorcées, avec les interventions de Vira Neema, consultante en IA, et Freddy Mpinda, conseiller principal à la Primature, qui ont présenté un état des lieux de l’IA à l’international et en RDC. Les experts Tommy Tumba et Aimé Mukuma ont ensuite détaillé la méthodologie et le chronogramme de rédaction avant la phase participative d’enrichissement et de validation.
Jonas TSHIPADI | NUMERICO.CD
