La deuxième journée des Rencontres congolaises de recherches sur le journalisme organisée par le Laboratoire de Recherches Sciences de l’information et de la Communication (LARSICOM), plusieurs jeunes chercheurs ont eu l’opportunité d’intervenir sur des matières.
Parmi ces jeunes chercheurs, il y a M. Allegra Bossay qui a présenté, ce vendredi 9 mai, à l’Institut National des Arts (INA), une analyse sur le sujet : « Journalisme et Intelligence Artificielle : éthique et déontologie dans les médias à l’ère des nouvelles technologies ».
Dans son exposé, M. Bossay a souligné quelques défis que l’IA pose dans le paysage médiatique congolais. « Dans le contexte des nouvelles technologies, les médias sont incités à la surproduction et à l’immédiateté », a-t-il fait observer.
Selon lui, cette quête effrénée d’information, intensifiée par les réseaux sociaux et les plateformes en ligne, remet en question la vérité.
« Des journalistes orientés, des producteurs de fausses informations, un manque de rigueur dans le traitement de l’information », mentionne-t-il en abordant les dérives de l’IA dans ce contexte instable.
À Kinshasa et dans certains médias, des outils comme ChatGPT ou Gemini sont déjà intégrés dans les rédactions. « Les journalistes congolais se servent de ChatGPT ou Gemini pour reformuler, corriger ou améliorer leurs contenus », souligne Bossay avant d’ajouter : « leur utilisation reste discrète, parfois taboue, en raison de l’absence d’un encadrement clair ».
Cette discrétion révèle une certaine gêne. L’IA est bien présente, mais elle fonctionne en coulisses, sans reconnaissance officielle ni accompagnement éthique. « Ni le Code de déontologie congolais ni l’Ordonnance-loi de 2023 n’encadrent l’IA, » alerte M. Allegra.
Pour lui, cette absence de réglementation crée une zone ambiguë, préoccupante pour l’avenir du journalisme. « Ce flou impacte la transparence, la responsabilité et la vérification, » signale-t-il.
L’intelligence artificielle dans les médias congolais est une réalité actuelle. Cependant, cette réalité évolue plus rapidement que la réflexion éthique nécessaire pour l’accompagner.
« L’IA est-elle un outil pour un journalisme amélioré ou une menace pour l’information ? » se questionne-t-il.
Allegra Bossay appelle à un réveil collectif, à la création urgente de nouvelles règles pour un journalisme loyal à ses principes, même à l’ère de l’automatisation.
Cependant, note-t-il, « l’IA peut aider le journalisme, mais elle peut aussi en éroder les bases si elle est laissée sans surveillance, et pour cela, il exhorte les institutions de presse, les écoles de journalisme et les autorités compétentes à s’engager dans un encadrement précis, transparent et responsable de ces technologies.
En outre, M. Bossay a averti que sans régulation, sans responsabilités clairement définies, le risque est élevé de voir proliférer les dérives, allant de la manipulation à la désinformation automatisée et à la dilution des responsabilités.
Il est à noter qu’Allegra Bossay est l’auteur de deux ouvrages sur l’IA : « Apprentissage numérique à l’ère de l’IA : avantages, inconvénients et outils » et « L’IA dans les médias : vers un journalisme augmenté et une menace pour l’information. »
Marcus SALOMÉ | NUMERICO.CD